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MANDALAY et les anciennes cités royales

Quelques uns des 200 000 moines de la région de Mandalay
20 au 22 novembre 2010

Située à 650 km au nord de Yangon, au centre géographique du pays, deuxième ville du Myanmar avec 1 million d’habitants, Mandalay fut la dernière capitale royale birmane. Avec 150 monastères et 200 000 moines dans la région, la «Cité d’Or» demeure la ville-symbole de la foi bouddhique. C’est la capitale religieuse et l’âme du pays. Aujourd’hui, avec la réouverture de route de la Chine, la ville connaît une relative prospérité… et les produits chinois bon marché inondent la région.
Le temple de Mahamuni abrite la plus célèbre statue de Bouddha du pays. Un des rites bouddhistes ( pour hommes seulement) consiste à coller des petites feuilles d’or d’un cm carré sur les statues de Bouddha les plus vénérées. Le Bouddha de Mahamuni a ainsi perdu ses lignes élégantes, tout boursoufflé qu’il est devenu, l’épaisseur des petits carrés collés atteignant par endroit plus de 15 cm ! Tous les matins, à 4hre, des moines lavent le visage du Bouddha et l’eau récupérée est embouteillée et considérée comme sacrée. Les femmes, considérées comme impures dans le bouddhisme birman, ne peuvent approcher ce Bouddha… par contre, les moines acceptent volontiers, tous les matins, les offrandes de riz et de nourriture qu’elles leur font !
Au-delà de la pagode Mahamuni, ce qui attire les visiteurs à Mandalay ce sont les quatre anciennes cités royales situées dans les environs. Comme on peut le constater, la junte n’a rien inventé en déplaçant la capitale… Nous avons visité les 3 plus importantes de ces cités : Amarapura, Inwa et Sagaing.
Fameux pont d'U Bein en teck, 1,2 km de long
AMARAPURA
Amarapura est célèbre pour son extraordinaire pont de teck en U de 1,2 km de long, le pont d’U Bein, bâti en 1849. Sublime et envoûtante, la balade sur l’eau en pirogue au coucher de soleil au pied du pont d’U Bein ! On dirait que toute la vie birmane prend plaisir à y défiler paisiblement en regardant le soleil rouge se coucher à l’horizon : moines qui déambulent sereinement, enfants qui gambadent, femmes avec ombrelles, paysans à vélo et pêcheurs attentifs.
Autre visite classique : le monastère Mahagandhayon qui est en fait une école pour les enfants défavorisés qui n’ont pas les moyens d’étudier. Les élèves, pris en charge par les moines, doivent respecter les 10 commandements de la vie monastique : avoir un grand cœur, suivre le code de discipline monastique, être en bonne santé, être propre, savoir s’habiller, être intelligent dans son comportement, marcher sereinement, parler de manière sensée, obéir aux règles et être assidu au travail. À l’heure du repas (10h15), l’attraction consiste à observer l’interminable filée de moines, petits et grands, qui viennent, en silence, chercher leur bol de riz et autres denrées. Ils s’installent au réfectoire, mangent un peu et gardent le reste pour plus tard. Il faut dire qu’entre 11h30 et minuit, les moines ne mangent aucun aliment cuit, ils peuvent seulement boire de l’eau et des jus de fruit.
En route pour Amarapura, nous avons pu aussi observer différents ateliers de métiers  traditionnels : les sculpteurs sur pierre de statues de Bouddha, les tisserands de la soie et les fabriques de feuilles d’or. Presqu’incroyable qu’en ce 21e siècle, ces métiers subsistent encore, surtout avec la Chine à quelques km qui inonde les marchés mondiaux de ses produits manufacturés à grande échelle !

Stupa et rizière à Inwa
     INWA
Il reste peu de choses de cette capitale qui régna pendant 400 ans, du 14e au 18e siècle, et pour cause… lorsque le roi décida de déménager sa capitale, il fit démolir son palais et tout le bois de teck fut récupéré pour bâtir le pont d’U Bein reliant ainsi les deux villages durant la période de la mousson. Certains auraient voulu utiliser le bois pour bâtir un monastère mais le roi s’y opposant prétextant que le bois ayant servi aux hommes ne pouvait servir à des moines.
L’attrait d’Inwa réside dans le fait qu’il faut prendre un petit traversier à pied pour s’y rendre et qu’une fois débarqué, une charrette à bœuf digne du Moyen-âge vous attend et le charretier vous offre de vous faire faire le tour de la bourgade pour 5$ pendant 3 heures ! Authentique et sympathique à souhait ! Évidemment, il y aura bien quelques haltes pour visiter des monastères, stupas et ateliers d’artisan mais le plaisir ultime réside dans le fait de se balader tranquillement et d’observer la vie rurale à partir d’une charrette à roues en bois tirée par un petit cheval !!!

Les nonnes bouddhistes défilent aussi dans les rues pour recueillir leur pitance

SAGAING
Construite en 1315 après la chute de Bagan, Sagaing, toute en collines, offre un panorama exceptionnel avec ses quelques 500 pagodes et monastères. Normal, Bouddha en personne est venu sur ces collines !
Après une dizaine de jours au Myanmar et après avoir vu tous ces temples, stupas et pagodes et surtout observé la ferveur et la dévotion de tous les birmans, jeunes et moins jeunes, on ne peut que conclure que le bouddhisme est encore bien vivant au Myanmar et omniprésent dans la vie quotidienne ! On rapporte que les birmans consacrent de 10 à 20% de leurs revenus (déjà maigres !) à l’entretien des pagodes et des moines. Certains disent même que la philosophie bouddhiste, plus fataliste qu’active, et qui prône le dénuement matériel génère une passivité indolente et souriante chez le peuple, ce qui arrange au plus haut point la junte militaire ! Par contre, les moines quittent de plus en plus leurs monastères pour se mêler du temporel, comme en témoigne en 2007 la révolte des bonzes :
«En août 2007, le gouvernement annonce une augmentation brutale du prix de certaines denrées alimentaires de base et, surtout des carburants : + 66% pour l’essence, +100% pour le diesel et +500% pour le gaz ! À genoux, la population n’a d’autre choix que de descendre dans la rue pour manifester sa colère. La réponse ne se fait pas attendre : répression et arrestation de dizaines d’opposants. En septembre, ce sont des moines qui font les frais de la répression en écopant des coups de bâton des militaires. Les bonzes pratiquent la politique du bol renversé en refusant les offrandes des policiers et des militaires, un véritable affront. De plus, ils exigent des excuses du gouvernement mais celles-ci ne viennent pas et ils recommencent à défiler dans les rues de Yangon. Le mouvement prend de l’ampleur et une semaine plus tard, rejoint par des religieuses bouddhistes, des étudiants  et une partie de la population, ils sont 100 000, peut-être plus, à manifester dans l’ancienne capitale ! C’en est trop pour la junte qui, le 27 septembre, passe à l’offensive, causant en quelques jours la mort de 31 manifestants (plus selon les sources étrangères) et procédant à des milliers d’arrestations. La «révolution pourpre» (de la couleur des robes des moines) aura tourné court et mis un terme aux fantasmes occidentaux qui voyaient là une démocratisation possible à moindres frais…»
Début 2008, il y a encore de l’agitation politique mais il y aura pire : la catastrophe de l’année, le dévastateur cyclone Nargis frappe en mai : des vents de 240 km/hre accompagnant une vague de 3,5 m de hauteur ravage la région de Yangon et le delta de l’Irrawaddy, le grenier à riz du pays. Finalement le bilan estimé serait de 140 000 morts et disparus, 800 000 personnes déplacées et plus de 2 millions sans abri. L’aide internationale se mobilise mais les généraux freinent les quatre fers craignant une invasion «humanitaire» qui mènerait au renversement de leur régime. La junte accepte au compte-goutte l’aide internationale en se graissant la patte au passage et refuse aux étrangers l’accès au pays. Finalement, dépassée par l’ampleur de la catastrophe, la junte accepte que les ONG se rendent sur place mais seulement 3 semaines après le drame…
Fin de ce triste «aparté» et retour à des récits plus joyeux !